« J'ai l'impression que les gens abordent le business comme un dessin animé de Walt Disney »
Elle est la fondatrice de Petit Web, un média en ligne (impertinent) dédié au marketing interactif et au monde des entreprises digitales. Chaque semaine Geneviève Petit scrute l'actualité de l'innovation numérique et en tire notamment une newsletter hebdomadaire – La Lettre du Petit Web – envoyée à plus de 42 000 lecteurs. Cette spécialiste du Web et de la communication et ancienne de CB News, expose pour Story Jungle les grandes lignes de Petit Web, sa vision sur l'actualité et les tendances digitales. Entretien avec une sentinelle avisée du Net.
Quel a été votre parcours jusqu'à Petit Web, qui existe maintenant depuis neuf ans ?
Geneviève Petit : J'ai eu un parcours très linéaire. Après des études à Sciences Po, j'ai atterri dans le milieu de la presse professionnelle de la communication : un univers que je n'ai jamais lâché. J'ai ainsi fait mes armes – entre autres – à Médias, un hebdomadaire spécialisé dans la communication, et CB News. J'ai également conçu le programme des conférences AD Tech en Angleterre, en France et en Allemagne, et écrit un livre enquête sur La face cachée de la Star Ac'. Dans le milieu des années 90, j'ai créé les Clics d'Or, grand prix de l'Internet. D'une certaine manière, j'ai toujours parlé de la même chose aux mêmes gens, de communication à des professionnels du milieu. Paradoxalement, il s'agit d'un sillon à la fois assez étroit et assez vaste puisqu'il aborde tous les aspects de la communication. Et aujourd'hui, notamment avec le digital, ce domaine touche des ressorts très profonds de la société.«Le « je » a un véritable regard journalistique sur les sujets et se soumet à une forme d'exigence.»
À ceux qui définissent le Petit Web comme un blog, que répondez-vous ?
G.P. : Nous sommes un média à part entière. La différence entre un blog et un média tient en une frontière très distincte. C'est la différence entre le « moi » et le « je ». « Le moi est haïssable », disait Pascal. Il ne s'agit pas de raconter sa vie. Le « je » a un véritable regard journalistique sur les sujets et se soumet à une forme d'exigence. Nous pensons sans arrêt à notre responsabilité par rapport à la communauté à laquelle nous nous adressons.«L'internaute est submergé par les informations et il me semble nécessaire qu'émergent – au-delà de ce brouhaha – une voix et un point de vue. »
Le ton impertinent constitue la marque de fabrique de Petit Web. Vous le développez notamment dans vos éditos hebdomadaires. Pourquoi ce choix éditorial ?
G.P. : La fonction de l'éditorial est majeure, encore plus aujourd'hui. L'internaute est submergé par les informations et il me semble nécessaire qu'émergent – au-delà de ce brouhaha – une voix et un point de vue. Tellement de choses se passent qu'il est difficile d'en saisir la cohérence ou le sens. Notre but est de faire voir plus clair à notre lecteur, à raison d'un sujet par semaine. C'est notre force. Attention, on ne se pose pas en tant que « gardiens de la raison » : on dit simplement ce que l'on pense. On se trompe comme tout le monde. Mais il s'agit d'une manière de prendre ses responsabilités et de ne pas avoir peur de dire ce que l'on pense. Ce qui est une des choses aujourd'hui les plus compliquées. Nous sommes dans une période où les gens ont très peur de dire ce qu'ils pensent.Avec 42 000 lecteurs, votre newsletter rencontre un succès indéniable. Pourquoi avoir choisi ce format plutôt qu'un autre ?
G.P. : C'est un joli fil à la patte. La newsletter permet de prendre contact directement dans la boîte aux lettres de quelqu'un. Il y a une voie directe entre l'émetteur et le transmetteur. Quand les internautes vous ouvrent leur boîte mail, il s'agit d'une permission ultime. Le mail est l'un des plus vieux trucs d'Internet, et probablement l'un des moins ringards. Notre taux d'ouverture est d'environ 40 %, ce qui reflète notre marketing. On n'a jamais demandé aux gens de s'abonner chez nous, fait de la conquête. Même si, lorsque nous organisons des événements, nous proposons aux participants de s'inscrire à la newsletter. Ils choisissent de le faire ou pas. Si nos lecteurs ouvrent, c'est qu'ils sont d'accord pour nous recevoir, et nous trouvent toujours intéressants, semaine après semaine. Il est important de ne pas être intrusif, du début à la fin.«Malheureusement, si on ne trouve pas très vite un système de remplacement au cookie, l'information gratuite va disparaître. »
Pour rebondir sur l'actualité, Google a annoncé le 14 janvier sa volonté de se débarrasser des cookies tiers d'ici deux ans pour son navigateur Chrome. Quel avenir pour les médias, à l'ère du possible post-cookie ?

Quel est votre mantra ?
"Je suis pressé, habillez-moi lentement". C'est ce que disait Napoléon à son majordome. Je suis sans arrêt impatiente. Je dois négocier avec moi-même pour relâcher le temps.Quel est votre gourou ?
Un astronaute de la mission Apollo, qui a failli ne pas revenir sur terre.Comment libérez-vous vos chakras ?
Avec mon chat Cracra.La logique aurait été de s'agréger à un service universel, comme France Connect, un accès universel aux administrations en ligne (un dispositif qui permet aux internautes de s'identifier sur un service en ligne par l'intermédiaire d'un compte existant). Certains diront qu'il n'est pas question de mêler informations et pouvoirs publics, mais ils sont déjà mélangés. L'état finance énormément les journaux.