« Le lien entre les médias et le public s’effiloche »
Le lien entre les médias et le public s'effiloche. L'intérêt pour l'information est en baisse, la « news avoidance » en hausse et la confiance loin d'être acquise. C'est l'une des conclusions du Digital News Report du Reuters Institute, publié ce 15 juin.
Une confiance en berne
Si le rapport de l'année dernière montrait des signes positifs pour le secteur des médias, avec une consommation accrue et une confiance en hausse, aujourd'hui, le tableau « est un peu moins optimiste ». La confiance dans les médias a chuté dans près de la moitié des pays de l'enquête. En moyenne, environ quatre personnes sur dix – soit 42% – font confiance aux médias (contre 44% l'année dernière). La Finlande reste le pays où le niveau de confiance globale est le plus élevé (69%). Avec 26%, les États-Unis affichent le niveau de confiance le plus faible. La France bénéficie d'un taux de confiance à 29% : la presse quotidienne régionale et France Télévisions récoltent « les lauriers ».
La « selective news avoidance » : une pratique de plus en plus courante
La proportion de consommateurs qui déclarent éviter les infos, souvent ou parfois, a fortement augmenté dans tous les pays. Ce type de « news avoidance » a doublé au Brésil (54%) et au Royaume-Uni (46%) au cours des cinq dernières années. Les motifs de cet évitement ? Ces personnes sont rebutées par la répétitivité de l'actualité, notamment en ce qui concerne la politique et le Covid-19 (43%), et se sentent épuisées par les informations (29%). D'autres pensent qu'on ne peut pas faire confiance aux médias (29%). Environ un tiers (36%), en particulier les moins de 35 ans, constatent que les informations font baisser leur moral.Par ailleurs, dans des pays comme l'Australie, les États-Unis et le Brésil, environ 15% des jeunes qui se détournent de l'actu disent trouver les nouvelles difficiles à suivre – une proportion beaucoup plus élevée que chez les consommateurs plus âgés. « Les médias pourraient faire beaucoup plus pour simplifier le langage et mieux contextualiser les histoires complexes », suggère le rapport.
La nature déprimante des news, le sentiment d'impuissance et les débats toxiques en ligne détournent de nombreuses personnes « définitivement ou temporairement » des médias.

La croissance des podcasts a repris
Les éditeurs ont beaucoup investi ces dernières années dans les podcasts. Les podcasts ont tendance à toucher un public plus jeune via les smartphones, et de nombreux éditeurs d'abonnements cherchent à utiliser des produits qui créent une habitude, comme le Daily du New York Times, pour attirer des clients plus jeunes.La croissance des podcasts a repris cette année sur plus de la moitié des marchés, le Covid-19 ayant perturbé le trajet domicile-travail et affecté négativement la consommation de l'actu. 34% (+3) des personnes interrogées ont consommé un ou plusieurs podcasts au cours du mois précédent, dont 12% ont accédé à un podcast d'actualité. L'Irlande, un pays avec une forte tradition audio, est en tête de la liste, ainsi que la Suède, « le pays de Spotify ».
Le New York Times lance cette année sa propre appli audio dans le but de créer du trafic plus direct. Schibsted en Norvège et Prisa Media en Espagne investissent également dans des plateformes de podcasts pour « un meilleur contrôle ».

Les newsletters, un canal « minoritaire » mais essentiel
La newsletter reste un format minoritaire, qui attire surtout les lecteurs plus âgés et instruits. Son utilisation a diminué dans de nombreux pays, alors que sa valeur pour certains utilisateurs et éditeurs a augmenté. De nouveaux canaux tels que les médias sociaux, les agrégateurs en ligne et les alertes d'actu via les téléphones portables viennent concurrencer ce format. Aux États-Unis, l'utilisation hebdomadaire a légèrement diminué, passant de 27 à 22% depuis 2014.Cependant, « malgré son manque relatif de sophistication, elle reste un outil essentiel pour les éditeurs, qui s'efforcent de nouer des relations plus étroites avec les utilisateurs fidèles et d'attirer de nouveaux abonnés », indique l'étude. On notera que Substack compte aujourd'hui environ un million d'abonnés payants à ses newsletters premium.

Le texte toujours roi
Depuis l'émergence d'internet, la consommation sur les sites d'infos et les apps a principalement consisté à lire des articles textuels. Mais l'offre croissante de formats d'actualités vidéo sur les médias sociaux est venue modifier le paysage.Dans ce contexte, « il est surprenant de constater que tous les groupes d'âge, en moyenne, déclarent préférer les informations en ligne plutôt que de les regarder ». Les jeunes sont beaucoup plus susceptibles de dire qu'ils regardent l'actu, « peut-être parce qu'ils sont plus exposés à des réseaux comme Facebook, Instagram et TikTok ».
56% des Français consomment l'actu par écrit.
