« Ce que l’on défend chez LinkedIn, c’est le « Members First » »
Propos recueillis par Louise-Camille Bouttier- Publié le 27 octobre 2018
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LinkedIn renforce sa présence éditoriale en développant ses rédactions dans le monde. Désormais, des journalistes produisent un contenu inédit (podcasts, vidéos, articles), tout en réalisant une curation de l'actualité proposée par les membres de la plateforme. Interview de Sandrine Chauvin, rédactrice en chef LinkedIn Europe, qui développe le concept de journalisme conversationnel.
Il y a 6 ans, LinkedIn lançait en France sa première cellule éditoriale, un an après les États-Unis. Pourquoi avoir choisi de créer des rédactions locales ?
Sandrine Chauvin : Il y a un
algorithme qui distribue des contenus dans le fil d'actualité, mais il faut aussi
un regard humain, pour être sûr que des conversations et du contenu de très
bonne qualité soient servis aux professionnels. Notre première mission est
d'accompagner les membres dans la production de contenus et de créer des
conversations autour des actualités économiques et business qui intéressent les
professionnels. Chaque matin, la rédaction publie le
LinkedIn Récap Actu, un
condensé des cinq actualités à retenir, à cela s'ajoute une idée du jour tirée
d'un article publié par un membre.
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Dans la Jungle des contenu :
S’inscrire Quel est le positionnement éditorial de LinkedIn ?
S.C. : Nous sommes
dans la prospective. Selon les études, il y a entre 30% et 50% des emplois dans
le monde qui vont disparaître ou se transformer dans les 5 à 10 prochaines
années. Il va falloir s'adapter, et vite. Pour cela, il faut avoir accès à
l'information et pouvoir anticiper les changements. Il faut donc être connecté
aux bonnes personnes et avoir une vision de l'avenir. LinkedIn et les contenus
diffusés sur la plateforme doivent accompagner ce changement.
En quoi consiste le journalisme conversationnel ?
S.C. : Ce que l'on
défend chez LinkedIn, c'est l'idée d'un journalisme participatif.
Il n'y a plus
le journaliste expert de son sujet. Il fait partie d'une communauté de gens qui
sont eux-mêmes dotés d'une expertise dans une thématique. Il enrichit les
conversations en posant des questions, en soulignant les bons points, en
invitant les membres à interroger des personnalités auxquelles ils n'ont pas
accès. Lors de l'université du Medef, nous avons interviewé la ministre du
Travail sur les réformes du code du Travail et de la formation. Nous avons
demandé aux membres de nous soumettre les questions qu'ils souhaitaient poser.
Elles ont ensuite été portées auprès de la ministre sous la forme d'une
interview vidéo. Dans les shows télévisés, ce sont deux personnes qui sont
sélectionnées. Là, potentiellement, on se repose sur toute la communauté des
membres.
millions de membres sur
LinkedIn France.
Quels sont les formats qui obtiennent le plus d'engagement sur la plateforme ?
S.C. : Tout dépend
de l'objectif. Si on souhaite poser une analyse, l'article est plus adapté : on
a le temps d'expliquer le sujet, d'indiquer l'angle et d'y répondre. Si on
couvre un évènement, on va plutôt utiliser le post. Pour la vidéo, c'est un peu
différent. Soit ce sont des vidéos très formatées où des influenceurs évoquent
un sujet en moins d'une minute, de façon récurrente. Un deuxième format
consiste en une capture d'une conférence par exemple, que l'on partage sur le
fil d'actualité. Troisième genre : le format interview, dans lequel des membres
deviennent journalistes en posant des questions, par exemple à des
entrepreneurs.
Comment sont diffusés les contenus produits directement par la cellule éditoriale interne ?
S.C. : Nous avons
donc des chaînes éditoriales indépendantes de toute activité commerciale qui
permettent de mettre le contenu en avant en fonction des thématiques abordées
et des professionnels concernés. Il est ensuite distribué sur leur fil
d'actualité ou via des notifications sur leur appli LinkedIn. Nous avons
également une newsletter d'actualité que les membres peuvent recevoir à la
fréquence de leur choix. La diffusion passe aussi par nos profils personnels de
journalistes, en tant que voix éditoriale de LinkedIn sur la plateforme. Le
concept de distribution de LinkedIn consiste à avoir une audience ciblée. Quand
un membre publie sur LinkedIn, il peut lui aussi voir quelle audience il touche
(dans quelle entreprise, quel métier, quelle zone géographique) et ainsi créer
une communauté active autour de ses thématiques.
millions
de publications chaque semaine sur LinkedIn
Comment jugez-vous l'intervention des éditeurs de presse sur LinkedIn ?
S.C. : C'est assez
timide, il faut qu'ils mettent en place une stratégie pour créer des
communautés et des conversations. Je ne suis pas sûre que l'aspect
conversationnel du journalisme ait pour l'instant été intégré dans les médias.
On sent que les choses bougent cependant. Un bon exemple, c'est le Harvard Business Review dont l'édition
anglophone dispose de deux millions d'abonnés dans un groupe, plusieurs
millions de
followers sur la page entreprise. Le HBR a également une forte
communauté de contributeurs qui passent parfois par LinkedIn pour valoriser du
contenu ou identifier des interlocuteurs.
Quel est votre gourou ?
Bertrand Piccard parce qu'il est autant entrepreneur qu'aventurier. Il a levé des fonds pour faire le tour du monde en avion solaire, puis créer la fondation Solar Impulse. Tout ça pour nous montrer qu'il existe des solutions rentables en matière de développement durable.Quel est votre mantra ?
« Osez ». C'est ce que je dis à mes enfants : osez aller au bout de vos projets et de vos rêves.Comment libérez-vous vos chakras ?
En me ressourçant avec ma famille et le plus proche possible de la nature. L'attention des éditeurs se porte de plus en plus vers les groupes. Comment voyez-vous ces communautés intervenir dans le dispositif de journalisme participatif ?
S.C. : LinkedIn
vient de lancer une nouvelle plateforme pour les groupes avec une expérience
aménagée pour créer des conversations de groupe. Les éditeurs peuvenat apporter
du contenu et créer différents formats pour enrichir cette communauté. La
prochaine étape dans le journalisme conversationnel consistera à voir des
communautés qui s'autoalimentent et où le journaliste est partie prenante du groupe
en tant qu'expert ou rapporteur.
Un producteur de contenu doit-il mener de front les deux batailles : la page entreprise et la mise en place d'un groupe ?
S.C. : Souvent les
éditeurs me répondent qu'il y a des problèmes de ressources. D'où l'idée de
mettre en place une stratégie adaptée qui repose sur trois piliers : une page
entreprise qui permet une communication verticale ; des groupes qui donnent de
la valeur à une communauté très précise et que l'on peut éventuellement convertir
en abonnés ; un programme d'ambassadeurs dans lequel des membres de la
rédaction incarnent la marque et « alimentent » les conversations de la
communauté.
Quelle sera la prochaine étape ?
S.C. : Nous venons
de publier la première édition du classement
LinkedIn Top Startups en France.
Nous publierons prochainement le nouveau classement Top Voices 2018 des membres
les plus influents sur LinkedIn. On a également pour projet de lancer des « séries » (par exemple, le futur du travail). Une thématique sera développée par
l'équipe éditoriale de LinkedIn et sera enrichie par les conversations ainsi
créées par la communauté.
bio
Sandrine Chauvin,
rédactrice en chef Europe chez LinkedIn
Sandrine Chauvin est rédactrice en chef Europe chez LinkedIn. Elle est journaliste, diplômée de Sciences Po. Lyon et du Celsa. Après un début de carrière à France 3, elle a décidé de revenir à la presse écrite en pigeant pour différents magazines dont le féminin Maxi ou Courrier Cadres. En 2010, elle a rejoint Capital.fr pour développer les rubriques "Carrière" et "Retraite", devenues les piliers du site en terme d’audience et de revenus. Toujours chez Prismamedia, elle a ensuite lancé le site de la Harvard Business Review en France. Il y a 3 ans, elle a rejoint LinkedIn, où elle a lancé la plateforme de publication en France ainsi que le programme Influencer en français. Elle est désormais responsable du déploiement de la stratégie éditoriale en Europe, où elle a créé des rédactions en France, en Allemagne et au Royaume-Uni.